Il est stupéfiant de lire la presse régionale au lendemain du festival du livre 2014 en Bretagne à Vannes le week-end du 20-21-22 juin. Les commentaires étaient clonés et artificiellement ciblés sur une baisse chiffrée des visiteurs à ce salon. Tous les textes vantaient l’éloge du chiffre : baisse de la fréquentation, diminution de la vente des livres, diminution des recettes.
A aucun moment, il était fait allusion à la richesse des échanges exprimés à travers ces deux jours de salon du livre entre les auteurs, les lecteurs, et les libraires. Et qui plus est tous les spots furent concentrés sur les auteurs « people ». Je les félicite et respecte leur talent littéraire reconnu et vital.
Mais il me paraît de bon aloi aussi, de préserver et de transmettre cette osmose intellectuelle, cette liberté d’expression pour tous et avec tous. La presse se situe aux antipodes de son rôle initial, elle bloque l’accès à la parole à cette frange culturelle méconnue, contrainte au silence, non entendue, non écoutée, non lue, non vue. La presse participe à cette exclusion consentie et organisée.
Nous pourrions imaginer un scénario addictif où la presse serait le dealer de people, propulsant le lecteur dans cette spirale de domestication, de soumission consumériste et dépendante, non maîtrisable en évinçant cette horizontalité non moutonnière, dotée de cette vibrionnante innovation tant au niveau des idées, du style, et de la réflexion.
Nous amorçons un carrefour évolutif, anthropologique et sociologique. Assistons-nous à la « finitude » de la presse dans son expression contemporaine ? Commence-t-elle son stade de fossilisation?
À nous de connecter, d’inter-connecter cette richesse intellectuelle méprisée, dissidente et résistante à cette « bien-pensance » académique hexagonale qui reste campée dans sa canopée protégée, et n’ose descendre dans la savane citoyenne déjà en route vers la » métamorphose » dirait Edgar Morin !
Patrick Moureaux