Notre regard est conditionné par nos origines géographiques, notre culture, les influences médiatiques circonstancielles, éphémères, changeantes et délétères. Nous observons « sous influence », et ce, dans notre quotidien le plus banal, et nous ne soupçonnons pas les répercussions imprimées sur la définition mentale des critères de la BEAUTE.
Ainsi, pays, continents, cultures, médias, comportements individuels, vont interférer sur la lecture épidermique. La viralité médiatique va instiller un mimétisme esthétique académique, occidental, planétaire, absolu, devenant ainsi l’unique référence.
La Peau est le reflet instantané de notre essence même, de nos origines, de notre affect, de notre bonheur, de nos tourments, de nos influences et de nos comportements. Elle code, reçoit, émet, et se connecte à son biotope sociétal contemporain. « L’individu est une unité, indissociable du corps en interaction avec le monde (milieu culturel, social, familial, historique, etc.) qui le contient » selon les termes de Michel Onfray.
L’épiderme est un spectacle permanent, vivant mais éphémère. La Peau serait l’actrice éternelle, la mise en scène serait réalisée par un public exigent. Nous sommes captifs de ce FORMAT esthétique occidental. Nous évoluons dans une dynamique DISCRIMINATOIRE du « paraître » Le regard collectif valide ces différentes composantes, les influence, les pérennise et les diffuse en favorisant ces attitudes excessives et soumises.
Aujourd’hui les ethnies minoritaires accèdent et remportent les concours de beauté, une Ethiopienne est élue miss Israël, miss América est d’origine Indienne, elles écrivent les nouvelles pages de l’histoire de la BEAUTE, en redessinant les frontières des canons de la beauté, diluant ainsi l’hégémonie mimétique « plastique » occidentale. Des top models noires lors de Fashion Week de Paris revendiquent plus de diversité chromatique sur les podiums, et militent pour exprimer ce droit dans des organisations comme « Diversity Coalition ». La peau organe ô combien essentiel et existentiel, exprime à ciel ouvert le manuscrit éphémère de notre existence, la surface signe la réalité profonde. « Ce qu’il y a de plus profond en l’Homme c’est la Peau » écrivait Paul Valery en 1931 dans « L’idée fixe » corroborant ainsi l’impérative nécessité d’un regard « ouvert » sur notre apparence naturelle dirait François Cheng dans son livre « Cinq méditations sur la beauté ».
Patrick Moureaux
François Cheng. Cinq méditations sur la beauté. Le livre de poche, 2010
Patrick Moureaux. Le Soleil dans la Peau. Robert Laffont, 2012
Courrier international. N° 1207-1208 décembre 2013, Les nouveaux canons de la beauté