Je souhaiterais aborder ici la notion de comportements sanitaires, notamment solaire, et traduire au mieux notre rapport contemporain au soleil. Ce travail a été l’objet de l’édition d’un essai scientifique transdisciplinaire publié chez Robert Laffont en 2012 intitulé LE SOLEIL DANS LA PEAU. Il résulte d’une confrontation scientifique s’articulant autour de quatre disciplines : Astrophysique ( Jean-Marc Bonnet-Bideau ), Anthropologie ( Alain Froment ), Neuro-Addictologie ( Aymeric Petit ), et Dermatologie ( Patrick Moureaux ). « Nous assistons de façon cérémoniale à la migration humaine estivale sur les plages hexagonales ou exotiques, mais avec un choix prépondérant pour les régions ensoleillées. L’homme est un animal de la chaleur. Chaque individu se projette dans l’immanence du bonheur physique et ludique à la recherche du plaisir en temps réel. Cette grand- messe solaire célèbre l’eucharistie du temps festif confisqué à la réalité quotidienne vampirisante et fossilisante. C’est l’antidote au catastrophisme ambiant, perfusé en continu dans nos esprits par nos chers médias. Le bord de mer et le soleil répondent à cette demande de thérapie collective, permettant de transcender le douloureux et le quotidien pressant, incitant à l’ivresse immanente de la « chair ».Le temps est suspendu, et la réalité pléthorique, virtuellement atomisée, nous sommes en apesanteur salvatrice. En se déshabillant de sa carapace socio-culturelle permanente et pesante, en s’exhibant à demi -nu sur le sable chaud, l’humain renoue avec ses origines animales. Ce rassemblement programmé dans cette posture, le rassure sur sa condition d’espèce et le déculpabilise de tout excès comportemental .La tolérance est reine pour cette fois, toutes les différences, physiques, épidermiques, colorées ou non, vestimentaires sont acceptées sans contre partie, c’est un temps « convivial » et absolu. Ce rite ludique profane devenu légitimité sociale, se substitue au temps sacré, devenu archaïque. Il s’identifie au groupe protecteur, et valide ainsi son attitude mimétique, mais risquée en raison d’une précoce « consumation » annoncée dirait Michel Maffesoli1, le père de « l’Homme post-moderne ».
Ce mouvement est-il réfléchi ? Est-il généré par le jeu des influences socio-culturelles ? Est-il conçu sous l’impulsion de notre inconscient ou bien soumis à la loi des neurosciences, exprimée par nos neurones miroirs ?
Ce biotope bacchanal est à portée de main, le plaisir est immédiat, les différents éléments le constituant sont assimilés à un SPA géant, un massage collectif, un sauna de masse et une gigantesque cabine de bronzage naturel, c’est un oui instantané à la vie, et l’expression d’une parenthèse anesthésiante. Nous retrouvons une sensation amniotique originelle et rassurante au contact de l’eau, le sable nous enveloppe et nous donne un sens minéral, donc naturel, et les rayons solaires nous réchauffent et illuminent notre intériorité. Nous ressentons un état de non-existence, de légèreté, de fuite médiatico-culturelle, de décalage spatio-temporel, de protection naturelle, d’évasion, d’exotisme. L’effet thérapeutique communautaire dépasse le risque sanitaire singulier.Tel est le sens post moderne exprimé par nos excès comportementaux, leur réalité déferlante mérite une compréhension médicale, afin de façonner un discours interactif adapté avec le grand public, non encore parvenu au statut de « patient » et tout mettre en œuvre pour qu’il n’y accède en aucun cas. »2
Je vous invite pour ce voyage Darwinien, au coeur de votre odyssée évolutive en vous plongeant dans cet ouvrage.
1 Michel Maffesoli. LA PASSION DE L’ORDINAIRE Miettes sociologiques. CNRS Editions, 2011
2 Patrick Moureaux. LE SOLEIL DANS LA PEAU. Editions Robert Laffont 2012